La procédure d’injonction de payer se simplifie et se dématérialise !

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La procédure d’injonction de payer se simplifie et se dématérialise !

La procédure d’injonction de payer est réglementée par les articles 1405 et suivants du Code de procédure civile. Il s’agit d’une procédure judiciaire non-contradictoire qui permet à un créancier de recouvrer, dans un délai relativement court, les sommes dues par son débiteur.

Pour ce faire, le créancier doit déposer une requête en injonction de payer devant la juridiction compétente, accompagnée des pièces justificatives.

Jusqu’à une récente réforme, si la requête était acceptée par le juge, ce dernier rendait une ordonnance portant injonction de payer. Le créancier devait alors faire signifier par huissier de justice ladite ordonnance à son débiteur. À compter de cette signification, le débiteur disposait d’un délai d’un mois pour former opposition. En l’absence d’opposition dans ce délai, le créancier demandait ensuite au Greffe de la juridiction devant laquelle la requête avait été portée d’apposer la « formule exécutoire » sur l’ordonnance (mention portée sur une décision permettant de la faire exécuter par un huissier de justice). Une fois l’ordonnance portant injonction de payer revêtue de la formule exécutoire, le créancier pouvait confier le recouvrement à un huissier de justice.  

Un décret n°2021-1322 du 11 octobre 2021 relatif à la procédure d’injonction de payer, aux décisions en matière de contestation des honoraires d’avocat et modifiant diverses dispositions de procédure civile, est venu modifier cette procédure. En effet, désormais, en cas d’acceptation de la requête par le juge, l’ordonnance portant injonction de payer est immédiatement revêtue de la formule exécutoire.

Cette réforme est entrée en vigueur le 1er mars 2022.

Le créancier doit donc désormais signifier à son débiteur la copie des pièces justificatives, la copie de la requête certifiée conforme et l’ordonnance revêtue de la formule exécutoire.

Autre nouveauté : l’acte de signification doit indiquer de manière « très apparente » le délai dans lequel le débiteur peut former opposition, la juridiction devant laquelle elle doit être portée ainsi que les modalités selon lesquelles ce recours peut être exercé.

À l’expiration de ce délai d’opposition et en l’absence d’opposition du débiteur, ce dernier ne peut plus exercer aucun recours et le créancier peut mettre en œuvre des mesures d’exécution forcée.

La conséquence de cette réforme est double. D’une part, en l’absence d’opposition, l’ordonnance portant injonction de payer produit tous les effets d’un jugement contradictoire.

D’autre part, cette réforme allège la procédure pour le demandeur. Désormais, il n’a plus besoin de demander au Greffe d’apposer la formule exécutoire. Il peut recouvrer sa créance immédiatement après l’expiration du délai d’opposition d’un mois.

Attention : si l’ordonnance est ab initio revêtue de la formule exécutoire, elle n’en devient pas pour autant un titre exécutoire ab initio. Elle ne pourra être qualifiée comme tel qu’à l’expiration du délai d’un mois suivant sa signification et à défaut d’opposition dans ce même délai. En d’autres termes, tant que le délai d’opposition d’un mois n’est pas écoulé, il n’est pas possible de faire exécuter l’ordonnance et donc de recouvrer la créance.

Ce décret du 11 octobre 2021 a été complété par un arrêté du 24 février 2022 pris en application de l’article 1411 du Code de procédure civile et un décret n°2022-245 du 25 février 2022 favorisant le recours à la médiation, portant application de la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire et modifiante diverses dispositions.

Ces textes précisent les modalités de la dématérialisation de la procédure d’injonction de payer, notamment concernant les pièces justifiant la requête. En ce sens, le nouvel article 1411 du Code de procédure civile dispose que les pièces seront mises à disposition du débiteur par voie électronique, sur le site www.mespieces.fr. Il s’agit d’une plate-forme qui est sous la responsabilité de la Chambre nationale des commissaires de justices et intégrée au réseau privé sécurisé des huissiers. Cela garantit la fiabilité de l’identification des accédants à la plateforme, la confidentialité et l’intégrité des documents déposés, la journalisation des transmissions et consultations opérées et l’établissement de manière certaine de la date de consultation.

Les modalités d’identification, personnelles, figurent sur l’acte de signification de l’ordonnance afin que le destinataire puisse accéder à la consultation.

Précisons que ces pièces justificatives seront laissées à la disposition du débiteur pendant une durée de dix-huit mois à compter de leur dépôt sur la plate-forme. Passé ce délai, le débiteur ne pourra plus y accéder.

Quid si le débiteur ne peut pas accéder à cette plateforme ? L’article 1411 alinéa 2 du Code de procédure civile dispose à cet effet que : « si les documents justificatifs ne peuvent être mis à disposition par voie électronique pour une cause étrangère à l’huissier de justice, celui-ci les joint à la copie de la requête signifiée ».

Ainsi, si le débiteur n’a pas accès aux pièces pour une raison qui est étrangère à l’huissier de justice, ce dernier devra joindre à la signification de l’ordonnance et de la requête, les pièces justificatives.

La loi de programmation 2018-2022, qui avait envisagé la réforme de la procédure d’injonction de payer, prévoyait la création d’une juridiction unique nationale des injonctions de payer qui centraliserait toutes les requêtes en injonction de payer, la JUNIP. En raison de la crise sanitaire, la création de cette JUNIP a été reportée au 1er septembre 2023, par la loi pour la confiance judiciaire du 14 avril 2021.

L’affaire est donc à suivre…

PB Avocats

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