Est-ce que le retard de paiement d’un salaire peut justifier que la rupture du contrat soit prononcée aux torts exclusifs de l’employeur ?

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Est-ce que le retard de paiement d’un salaire peut justifier que la rupture du contrat soit prononcée aux torts exclusifs de l’employeur ?

Un salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur le 10 juin 2011 et a saisi, le 8 août 2011, la juridiction prud’homale de diverses demandes relatives à l’exécution et la rupture de la relation de travail.

Pour rappel, la prise d’acte est une rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié qui reproche à son employeur des manquements graves.

Le contrat de travail est rompu immédiatement. Le salarié saisit alors le juge pour que celui-ci statue sur les effets de cette rupture.

Elle sera soit considéré comme :

– Un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits reprochés à l’employeur étaient suffisamment grave pour la justifier.

– Une démission, si les faits invoqués ne le justifiaient pas.

Dans cette affaire, le salarié avait pris acte le 10 juin de la rupture pour le non-paiement d’un salaire exigible le 31 mai.

La cour d’appel a jugé que la prise d’acte de la rupture devait bien être prononcée aux torts de l’employeur et s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle a, en conséquence, condamné l’employeur.

En effet, selon les juges, l’absence de paiement du salaire résultait du seul manquement de l’employeur. Ils ont ainsi déduit qu’il avait empêché la poursuite du contrat de travail.

Or d’après l’employeur, qui s’est pourvu en cassation, celui-ci n’avait que 11 jours de retard sur le paiement et le salarié n’avait même pas pris la peine de l’alerter sur l’absence de versement de cette somme. Toujours selon l’employeur, ce manquement ponctuel n’était pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail. De plus, le salarié avait agi de manière prématurée, sans lui permettre de régulariser la situation.

Cependant, la Cour de cassation reprend le raisonnement suivi par les juges du fond dans le cadre de leur pouvoir d’appréciation souverain du litige.

Le non-paiement du salaire du mois de mai justifiait bien que la rupture soit imputée à l’employeur. Le paiement du salaire est une obligation qui incombe pleinement à l’employeur, et le salarié n’a pas l’obligation de mettre son employeur en demeure de régulariser le paiement d’un salaire en retard.

Cass. soc. 6 juillet 2022, n° 20-21.690 D

PB Avocats

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