Salarié protégé et présomption de démission : quelles règles applicables ?

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Salarié protégé et présomption de démission : quelles règles applicables ?

La création de la présomption de démission en cas d’abandon de poste a marqué une évolution majeure du droit du travail. Toutefois, son application aux salariés protégés, qui bénéficient d’une protection contre les mesures de licenciement, soulève des interrogations. L’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 mars 2025 offre un éclairage important sur cette question sensible.

Le cadre juridique applicable

L’article L.1237-1-1 du Code du travail organise la présomption de démission : après mise en demeure restée sans réponse, l’employeur peut considérer le salarié comme démissionnaire. Un délai minimal de quinze jours est prévu par l’article R.1237-13.

Cependant, pour les salariés protégés (articles L.2411-1 et suivants), la rupture du contrat de travail par l’employeur nécessite toujours une autorisation préalable de l’inspection du travail. Le texte sur la présomption n’a pas prévu d’exception.

L’apport de l’arrêt du 6 mars 2025

Dans l’affaire opposant la SAS Charles Services à un salarié protégé (du fait de son mandat de conseiller du salarié), l’employeur avait considéré son salarié comme démissionnaire après mise en demeure, sans solliciter l’inspection du travail.

La cour rappelle que :

    • La présomption de démission implique une intervention active de l’employeur ; elle n’est pas une démission purement volontaire.
    • En conséquence, pour un salarié protégé, l’autorisation administrative est obligatoire avant toute rupture, même fondée sur la présomption.
    • En l’absence de cette autorisation, la rupture est nulle et la réintégration du salarié doit être ordonnée.

    En l’absence de précision législative, la solution judiciaire retenue protège le salarié protégé contre des ruptures abusives. Toutefois, cette situation d’insécurité juridique mériterait une clarification par la Cour de cassation pour uniformiser la pratique.

    Conclusion

    La présomption de démission n’exonère pas l’employeur de respecter la protection attachée au statut du salarié protégé. En l’état, toute rupture du contrat sans autorisation administrative encourt la nullité. La prudence reste donc de mise en attendant une prise de position claire de la haute juridiction.

    CA Paris, 6 mars 2025, RG n° 24/02319

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