Une prise d’acte est-elle justifiée si des primes sont payées par l’employeur avec plusieurs années de retard avant la prise d’acte ?

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Une prise d’acte est-elle justifiée si des primes sont payées par l’employeur avec plusieurs années de retard avant la prise d’acte ?
La prise d’acte : un mode de rupture du contrat de travail

La prise d’acte est un mode de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié en raison de faits qu’il reproche à son employeur. Elle « permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail » (Cass. soc. 26 mars 2014 n° 12-23634).

Elle produit les effets suivants (Cass. soc. 25 juin 2003, 01-42.679) :

  • Un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient
  • Une démission, si les faits invoqués ne le justifiaient pas.
La prise d’acte entraîne une cessation immédiate du contrat

La prise d’acte par un salarié de la rupture de son contrat de travail entraîne alors la cessation immédiate du contrat de travail (Cass. soc. 30 janvier 2008 n° 06-14218) et le salarié n’est pas tenu d’exécuter un préavis.

En mai 2009, une salariée a par lettre pris acte de la rupture de son contrat. Elle a ensuite dirigé ses demandes en paiement au titre d’un rappel de salaires et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à l’encontre de son employeur.

Il est important de rappeler que le non-paiement de primes constituant une partie importante de la rémunération d’un salarié peut justifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par celui-ci (Cass. soc. 15 septembre 2015, n° 14-10416 D).

La Cour d’appel de Paris avait estimé que sa prise d’acte produisait les effets d’une démission. La Cour d’appel retenant que « l’employeur avait régularisé, avant la prise d’acte, le paiement des primes qui restaient dues à la salariée en 2006 et 2007 ».

Toutefois, la salariée avait contesté cette décision en raison du fait que l’employeur avait effectué ce paiement après avoir été condamné à le régulariser. En effet, la salariée avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande en résiliation judiciaire de son contrat. Et c’est au cours de cette procédure que celle-ci avait pris acte de rupture.

Cependant, la juridiction suprême a rejeté son pourvoi et confirmé la décision de la Cour d’appel en retenant que l’employeur ayant régularisé avant la prise d’acte, ce manquement ne rendait pas impossible la poursuite du contrat de travail.

Cette décision vient donc confirmer des décisions précédentes (Cass. soc. 26 mars 2014, n°12-23.634 ; Cass. soc. 23 septembre 2014, n°13-19.900) où des manquements anciens commis par un employeur ne justifient pas une prise d’acte.

Cass. soc. 21 avril 2017, n° 15-19353 D

PB Avocats

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